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Des chercheurs malawiens utilisent les résidus de culture pour aider les agriculteurs à soigner le tabac tout en sauvant des arbres, en réduisant les coûts et en atténuant la crise…

Des chercheurs malawiens utilisent les résidus de culture pour aider les agriculteurs à soigner le tabac tout en sauvant des arbres, en réduisant les coûts et en atténuant la crise de la déforestation dans le pays.

La dépendance de la culture à l’égard du bois de chauffage pour le séchage favorise la déforestation, mettant en péril à la fois les forêts et les moyens de subsistance.

Le tabac est l’épine dorsale de l’économie du Malawi, représentant les deux tiers des recettes en devises et employant des milliers d’agriculteurs. Pourtant, son avenir est menacé.

Pendant des décennies, le gouvernement et les projets de développement ont encouragé la plantation d’arbres en fournissant des plants gratuits ou subventionnés, mais la déforestation reste importante.

La pression sur les forêts continue de s’aggraver, menaçant le tissu même de l’économie du Malawi.

Face à ce défi, une équipe dirigée par Judith Kamoto, professeur agrégé de sylviculture et de développement rural à l’université d’agriculture et de ressources naturelles de Lilongwe, au Malawi, a étudié la possibilité d’utiliser des briquettes de biomasse comme combustible alternatif pour le séchage du tabac.

Dans cet entretien, l’universitaire donne un aperçu de son étude et de certaines recommandations politiques nécessaires pour soutenir les résultats de sa recherche.

La recherche s’intitule « Alternative sustainable renewable biomass for tobacco curing in Malawi : Une évaluation de la qualité et de la performance du combustible ».

Soutenue par la Science Granting Councils Initiative (SGCI), la recherche a évalué si les briquettes fabriquées à partir de résidus agricoles compressés tels que les balles de riz et les tiges de maïs pouvaient offrir une solution renouvelable.

Tester une alternative

L’étude a comparé les briquettes au bois de chauffage en termes de qualité du combustible, de performance, d’émissions et d’impact sur la qualité des feuilles de tabac.

Tabac dans le séchoir, prêt à être transformé
Tabac dans un séchoir, prêt à être transformé.

L’analyse des combustibles a montré que les briquettes ont un contenu énergétique et une efficacité de combustion comparables à ceux du bois de chauffage.

Lors des essais de séchage, des briquettes ont été utilisées pendant les six premiers jours avant d’être remplacées par du bois de chauffage pour la chaleur élevée nécessaire au séchage final.

Ce système hybride a permis de réduire la consommation de bois de chauffage de 57 %, économisant ainsi plus de la moitié du bois nécessaire.

« Les briquettes se sont révélées efficaces dans les premières phases de durcissement », explique Judith Kamoto.

« Nous avons réduit la consommation de carburant tout en conservant la même qualité de feuilles séchées.

« Ce qui nous a le plus surpris, c’est la stabilité du contrôle de la température, en particulier pendant la phase de jaunissement. Contrairement au bois de chauffage, qui nécessite des soins constants, les briquettes maintiennent les températures à ±2°C, ce qui améliore l’homogénéité et réduit la main-d’œuvre. »

L’étude a également révélé que le séchage en briquettes produisait moins de feuilles rejetées que le séchage au bois de chauffage, ce qui laisse entrevoir un potentiel d’amélioration de la qualité du rendement.

Enjeux environnementaux

Le Malawi a l’un des taux de déforestation les plus élevés de la région de la Communauté de développement de l’Afrique australe, la forte dépendance au bois de chauffage pour le séchage du tabac en étant l’un des principaux facteurs.

Les conséquences sont graves. Envasement des masses d’eau, réduction de la biodiversité et aggravation des effets du climat.

« Une réduction de 57 % de l’utilisation du bois de chauffage permettrait de préserver environ 7 500 hectares de forêt par an », soutient la chercheuse. « Cela équivaut à 12 % des objectifs de reboisement du Malawi dans le cadre de l’initiative AFR100.

En transformant les déchets agricoles en combustible, les briquettes présentent également un double avantage : elles réduisent la perte de forêts tout en réutilisant des résidus qui, autrement, resteraient inutilisés.

Obstacles et opportunités

Malgré leur promesse, les briquettes se heurtent à des obstacles. L’accès limité et le manque de sensibilisation restent les principaux obstacles.

« De nombreux agriculteurs ne savent tout simplement pas qu’il existe des briquettes ni comment ils peuvent réduire leurs coûts », fait-elle savoir.

« Nous avons besoin de campagnes de sensibilisation, de démonstrations et d’investissements dans la conception de granges pouvant mieux accueillir les briquettes.

Fours traditionnels pour le séchage du tabac
Fours traditionnels pour le séchage du tabac. Crédit photo : Prof Judith Mangani Kamoto

Les fours conventionnels ont été conçus pour le bois de chauffage et présentent des difficultés pour l’utilisation de briquettes uniquement. Les températures élevées des fours provoquent parfois la fonte des briquettes, ce qui limite le flux d’oxygène et entraîne une combustion incomplète.

L’équipe de recherche prévoit de poursuivre ses travaux sur de petites modifications de conception afin d’optimiser les performances du carburant.

Orientations politiques

L’étude met en évidence des priorités politiques claires.

Promotion des combustibles de biomasse durables pour réduire l’utilisation du bois de chauffage et préserver les forêts, investissement dans la recherche et le développement de briquettes pour améliorer la densité et l’efficacité.

Intégrer les carburants de substitution dans les politiques nationales en matière d’énergie, de sylviculture et de tabac, avec des objectifs de réduction clairs, et renforcer les preuves par des essais à long terme pour guider l’adoption à grande échelle.

Pour Judith Kamoto, les décideurs politiques doivent agir rapidement.

Selon elle, l’étude montre que les briquettes peuvent fonctionner avec le soutien adéquat, qu’elles peuvent transformer le secteur du tabac, aider les agriculteurs, préserver les forêts et aligner le Malawi sur les objectifs mondiaux en matière de développement durable.

Le rôle du SGCI

Le financement de la SGCI a permis de faire avancer la recherche. Pour Judith Kamoto et son équipe, ce soutien était vital. Le soutien financier a permis la mise en œuvre réussie de ce projet », dit-elle.

Une voie durable pour l’avenir

Les résultats mettent en évidence une opportunité évidente. Les briquettes peuvent réduire l’utilisation du bois, diminuer la déforestation et renforcer le secteur du tabac au Malawi.

Mais l’adoption de ces mesures nécessitera des efforts coordonnés, allant de la réforme des politiques à la formation des agriculteurs, en passant par l’engagement du secteur privé.

Selon la chercheuse, les briquettes constituent une solution pratique et durable. « Si elles sont adoptées, elles peuvent contribuer de manière significative à la préservation de l’environnement, à l’amélioration des moyens de subsistance et à une chaîne de valeur du tabac plus durable au Malawi ».

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Publié le 9 septembre 2025

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